Un billet de Véronique Morel
Toujours dans la même démarche de tisser des liens avec nos sœurs autochtones, les femmes de LA MARIE DEBOUT accueillaient Melissa Mollen Dupuis le 18 février dernier, alors que Montréal ployait sous une épaisse couverture de neige.
Jeune femme rieuse, dynamique, conteuse, Melissa s’approprie le territoire des lieux sans flafla, sans présentation. Nous voilà happées dans son sillon, le cœur ouvert à l’abondance de ses mots, nos sens devenus capteurs de rêves. Et pourtant, nous sommes en pleine réalité d’IDLE NO MORE.
Melissa nous raconte…
Native de Mingan sur la Côte-Nord, Melissa se convainc que son avenir est à Montréal où elle désire parfaire sa formation artistique.
Theresa Spence amorce une grève de la faim en 2012; les chefs autochtones tentent en vain d’entrer à la Chambre des communes, alors que les députés votaient sur le projet de loi omnibus C-45; le mouvement IDLE NO MORE prend racine dans l’Ouest canadien; autant d’événements qui secouent Melissa. Elle se demande qui, au Québec, pourrait bien réveiller la population et la sensibiliser sur les enjeux cruciaux touchant les Autochtones. Qui ?
La réponse lui saute aux yeux : ELLE. Avec Widia Larivière, elle fonde la branche québécoise du mouvement, dont elle nous explique ses actions et revendications pacifiques. Le temps des confrontations est terminé; celui de la connaissance de l’autre et du dialogue est amorcé. Plutôt que d’opposer Blancs et Autochtones dans des vues racistes, comme on l’a fait depuis toujours, Melissa nous convie à un apprentissage respectueux des cultures, mais dans une approche contemporaine des réalités autochtones.
La jeune femme anime aussi des groupes au Jardin des Premières Nations en faisant découvrir les différentes facettes de sa double appartenance innue et québécoise; elle raconte le métissage des cultures à travers les arts visuels, l’animation, la performance et le conte.
Nous nous sommes imprégnées de la vivacité, de l’authenticité et de la chaleureuse personnalité de Melissa. À nous maintenant d’emboîter le pas pour soutenir les Autochtones dans leurs revendications; à nous de marcher le territoire avec eux; à nous d’entendre ce qu’ils ont à nous dire. Fini l’inertie !
Toute notre gratitude Melissa pour la passionnante rencontre… et à bientôt !
Merci à Véronique Morel et Nicole Desaulniers pour les photos.
De la grande visite à La Marie Debout mercredi dernier, alors que Sonia Bonspille Boileau est venue de Gatineau nous présenter son film LAST CALL INDIAN.
C’est dans une atmosphère détendue que Sonia nous a d’abord raconté sa trajectoire : sa quête identitaire, la crise d’Oka qu’elle a vécu à 13 ans, les effets sombres et lumineux de ce point tournant à Kanesatake. Elle nous décrit en toute simplicité comment jusque là, la communauté parfois divisée jusqu’à la crise avait appris à se tenir ensemble.
Parlant de l’importance de la culture et des arts chez les Autochtones, Sonia dit : « on nous a déraciné et l’art nous permet de nous enraciner ».
Toute notre gratitude à toi, chère Sonia et à bientôt !
La maison de la culture Maisonneuve présente jusqu’au 16 février l’exposition Dessiller de l’artiste Sylvie Cotton qui nous ouvre les yeux sur la fin de vie des aînés.
Nous étions vingt femmes à nous réunir mercredi soir dernier pour rencontrer la cofondatrice du théâtre ONDINNOK, première compagnie de théâtre autochtone professionnelle du Québec, fondée en 1985.
Nous sommes suspendues à son récit, qu’elle nous livre d’une voix profonde et calme, tout son corps semblant danser ses mots. Catherine nous raconte certaines expériences qui l’ont marquée plus particulièrement, comme la légende inuit d’Ukuamaq, l’univers sacré des communautés maya-quiché du lac Atitlan au Guatémala dans Le désir de la reine XOC, le théâtre de guérison avec la communauté Atikamekw de Manawan, en Mauricie, le mythe de la création du monde selon les Hurons-Iroquois, Iwouskéa et Tawiskaron, puis ce spectacle fou, Le Roi d’Hochelaga, joué au mois de janvier 1999 par moins 25 C degrés à la belle étoile et sous une grande tente cérémoniale (Shaputuan). Catherine nous en montre un court extrait, comme sorti du cadre du temps… Puis, point tournant pour Catherine, l’écriture de son premier texte, Le rendez-vous kiskimew, qui sera monté par la compagnie en 2000-2001. Catherine nous offre un extrait, comme ça, sur le vif. Nous sommes émues, transportées, saisies.
Quelques paroles remplies de feu semblent flotter dans les airs en cette froide soirée de janvier : les sociétés amérindiennes ne sont pas des sociétés morales, mais des sociétés éthiques; la légende inuit, c’est le récit d’un combat chamanique; la grosse bûche du théâtre de guérison, sur laquelle on frappe jusqu’à apaisement; le travail avec les pierres… les pierres, ce sont les mémoires, les os de la terre; dans le mythe de création du monde, avant, il n’y avait rien; dans le travail de recherche, un mur d’ancêtres; la kokom, la grands-mère dans TU É MOI, la toute dernière production d’ONDINNOK; le travail sur l’imaginaire des langues Cree, innue… et cette vision de Catherine qui sort de son sac un très vieux dictionnaire français-cree !
Et en attendant, allez donc vous promener sur le site web d’ONDINNOK pour découvrir le trésor de leurs productions depuis 1985 :
