Tremblez, tremblez, les sorcières sont de retour !

L’historienne Silvia Federici reproche à Foucault d’avoir totalement ignoré la répression vis-à-vis des sorcières dans son étude sur la sexualité ; et à Marx d’avoir relégué leur chasse aux oubliettes, comme si elle était sans rapport avec la lutte des classes. « Cependant, l’ampleur du massacre aurait dû éveiller quelques soupçons […]. La chasse aux sorcières a eu lieu en même temps que la colonisation et l’extermination des populations du Nouveau Monde, les enclosures, le début de la traite des esclaves, la promulgation des « Bloody Laws » (réprimant) les vagabonds et les mendiants […]. On aurait pu trouver un sens à tout cela ».

On en trouve un aujourd’hui. Dans une période marquée par le désastre écologique et la crise du capitalisme, les sorcières n’ont jamais semblé aussi modernes. Les prendre au sérieux, elles et leur héritage, les faire rentrer – enfin ! – dans les études universitaires, c’est dérouler jusqu’à nous des fils ultracontemporains et ô combien utiles pour le féminisme, la critique du néolibéralisme contemporain, et c’est remettre du féminin dans une Histoire qui en manque singulièrement, qu’elle soit marxiste ou non…

Mieux comprendre la « transition vers le capitalisme », c’est aussi mieux saisir « la misogynie qui imprègne toujours les pratiques institutionnelles et les rapports hommes-femmes », écrit Silvia Federici. C’est réaliser comment l’association des femmes et de la nature a été utilisée pour les dévaloriser toutes deux, schéma qui perdure.

Le passé vit dans le présent, écrit Starhawk. « Les expropriateurs se déplacent dans le tiers-monde, détruisant les cultures, pourvoyant la connaissance occidentale estampillée, pillant les ressources de la terre et des gens […]. La fumée des sorcières brûlées est encore dans nos narines ; elle nous intime […] de nous considérer comme des entités séparées, isolées, en compétition, aliénées, impuissantes et seules ».

L’antidote, pour Starhawk la néo-païenne, consiste précisément à se nommer sorcière. Et se nommer sorcière, c’est rendre aux femmes le droit d’être puissantes et même dangereuses, faire d’elles les héritières des guérisseuses et des sages-femmes. Et ouvrir de nouveaux possibles, politiques, artistiques.  Tremblez, tremblez, les sorcières sont de retour… ­

Une suggestion de lecture de Véronique Morel  :

http://www.telerama.fr/idees/et-si-les-sorcieres-renaissaient-de-leurs-cendres,124987.php

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