Nous, les femmes en tournage à Ville-Marie : jour trois

Mercredi 30 octobre 2013
 

Les arbres-filles : « Chaque arbre possède sous la terre une version première de lui-même. L’arbre vénérable abrite un « arbre caché », souterrain, constitué par un réseau de racines vitales qui s’abreuvent en permanence à des eaux invisibles. À partir de ses racines, l’âme cachée de l’arbre fait monter l’énergie afin que sa vraie nature, sage et audacieuse, puisse s’épanouir au-dessus du sol. Il en va de même de l’existence d’une femme. Malingre ou flamboyante, quel que soit l’état dans lequel elle se trouve en surface… il y a en dessous d’elle une « femme cachée » qui entretient l’étincelle d’or, cette énergie éblouissante, cette source d’âme qui ne se tarit jamais. La « femme cachée » tente toujours de faire remonter cette force vitale… à travers le sol aveugle pour nourrir sa partie haute et le monde à sa portée. Ses périodes d’expansion et de réinvention dépendent de ce cycle.  Avez-vous jamais aimé d’amour un arbre ? Si vous avez aimé un arbre ou une forêt, vous savez que certains arbres, même dans les pires circonstances, surprennent tout le monde et sont là pour témoigner de leur retour à la vie. L’étincelle d’or, une fois encore ».
Clarissa Pinkola-Estés, La danse des grand-mères, éditions Grasset, 2007, p. 38

C’est avec ces mots que nous commençons notre première journée d’atelier, sur le thème de la transformation de notre identité, de nos rôles, au gré des âges.

Il y a Danielle, Diane, Micheline, Lorraine, Lise, Janine, Stéfanie, Josée, Martine et Geneviève qui tournent, Nicole et moi qui coanimons ce matin. Nicole anime l’exploration par le dessin. Elle nous fait voyager à partir des arbres, des tranches de vie, des cernes de croissance, des spirales qui révèlent nos places de luttes, de difficultés, de dépassement, de découvertes.  Les échanges en grand groupe sur le thème sont tellement riches, ils reflètent notre diversité, nos âges différents, nos places d’apprentissage.  Quelques mots viennent résonner plus particulièrement :

Je ne suis pas qu’un rôle.  Avec l’âge, je reconnecte avec la fragilité et la force, l’ombre et la lumière… Là, je me sens un peu prise dans le goulot du sablier, je me sens comme quand j’étais jeune :  là, je suis quoi moi ?… Je ne veux plus prendre les choses pour acquises, je suis dans l’exploration… Avant, j’étais dans une espèce d’enracinement dans la superficialité. Un jour, j’ai dit : « non, c’est assez ».  Je suis retournée aux études. Et de découvrir le sens des choses, le pourquoi des choses, j’en aurais pleuré… Il y a une grande tranche de vie, ma ménopause ! Quand j’ai compris que c’était à l’œuvre en moi, ça a été moins difficile.  Mon identité de femme fertile s’est transformée pour la créativité. Je veux toujours garder cette créativité et la partager avec d’autres femmes, comme dans le projet Nous, les femmes… Il y a eu des transformations dans mon corps, reliées aux hormones, au corps qui change. Mais quand j’ai traversé tout ça, ça m’a renforcée.  Mon écorce n’est pas juste un bouclier !  En vieillissant, j’ai découvert la beauté et la puissance liées à l’avancée en âge. Je me sens encore plus interactive avec mon environnement…

Et je pourrais poursuivre encore et encore en extraits saisissants… Mais il se fait tard, déjà minuit moins cinq et ma journée a commencé à 7 :30… et recommence dans quelques heures !

Un mot cependant avant de vous laisser : comme j’en faisais la remarque dans les deux derniers billets, nous travaillons à l’intérieur et à l’extérieur, pour créer une sculpture, une œuvre collective, à partir d’un des plus grands arbres de Ville-Marie, coupé récemment juste devant la maison de Janine, pour le plus grand traumatisme des femmes présentes et des citoyens concernés.  Mais créer une œuvre célébrant la vivance des femmes, comme l’écrit si bien Pinkola-Estés, c’est une réponse poétique et politique à l’aberrante bêtise qui amena à un tel geste brutal et banalement bureaucratique !  Et les grands-mères disent haut et fort : ça suffit !  Et nous travaillons tout le reste de la journée sur… les racines.

À suivre…

31 octobre 2013

Nous, les femmes en tournage à Ville-Marie : jour trois

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Une réponse à Nous, les femmes en tournage à Ville-Marie : jour trois

  1. avatar Véronique Morel dit :

    Les mots de ce troisième jour sont éblouissants. Même si les arbres du parc semblent avoir perdu l’éclat de leur jeunesse, leurs chevelures grises ou blanches illuminent les échanges, réchauffent l’âme dans cette journée qui semble frisquette!

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